Récits de courses

TOTEM POLE RACE 2002
Récit icon Récit Publié le 20/07/2005
Arrivée vers 21h à Las Végas dans le Nevada, en sortant de l’aéroport, la ville affiche de suite la couleur, on voit des dizaines de limousines qui attendent les passagers de certains vols. Mais ce n’est pas pour nous, on monte dans deux minibus qui nous emmènent dans un hôtel en marge de Las Végas avec seulement 300 chambres, piscine, jacuzzi et l’incontournable salle de jeux. Le lendemain (après personnellement une heure de natation dans la piscine et 15 mn de jacuzzi), on prend le départ pour Monument Valley à 6 h 30 mn environ de route de Las Végas.
Le long du parcours, on distingue les spots de moto cross où les bikers ont des kilomètres de terrain d’entraînement, on distingue aussi la progression et l’expansion des villes en limite de l’état du Nevada (une chose frappante est que les américains construisent les terrains de golf avant les maisons ?!!), passage sur le barrage du lac Powell et enfin, au bout de 5 h de route, je découvre l’immensité de l’ouest grand ouvert devant moi, ce poème titanesque fait de roches couleur ocre, hérissé de cheminées de grès rouge, creusé de canyons, d’herbes et de vent me renvoie à la fascination de mon enfance marquée par les westerns de John Wayne. Monument Valley, parc de 12 000 hectares, qui appartient aux indiens Navajos, a été immortalisé par des westerns comme « la chevauchée fantastique » ou « la charge héroïque ». Monument Valley, situé entre l’Utah et l’Arizona, est l’un des sites naturels les plus fascinant des U.S.A. Symbole des grands espaces américains, il est devenu celui de l’Amérique mais c’est aussi la terre tribale sacrée Navajos.
On s’arrête au seul camping qui fait face aux géants de grès rouge, le coucher de soleil est divin, suivi d’une nuit étoilée magnifique mais très fraîche. Le lendemain debout à 5h du matin pour voir les premières lueurs du soleil, spectacle éblouissant jusqu'à que le roi soleil dédaigne se montrer vers les 7 h.

1 ère étape de 30 km :

Départ du camping sur une piste très large et roulante pour environ 1h avec comme témoin de notre passage ces hauts rochers couleur ocre qui se nomment « les trois sœurs », « le gant droit et le gant gauche » et maints autres géants rouges ou ocres que l’on croise en courant. On croise aussi quelques pick-up américains avec au volant les indiens Navajos, il est loin le temps des indiens à cheval. Puis on prend une piste plus étroite en s’enfonçant de plus en plus dans ce désert de l’ouest américain, on prend un petit canyon dit « Washes » avec une rivière où plutôt un filet d’eau, je m’imagine dans ce passage, que les indiens sont tapis au dessus de moi en embuscade brusquement surgis de l’écran de mes souvenirs. Du sel ressort du sol par endroit en donnant l’impression irréelle qu'il y a neigé peu de temps avant notre passage. La première étape affiche les premières difficultés qui sont la chaleur et le sable, (le sable surtout pour moi, je n’arrive pas à courir dans ce angry !!! de sable, je perds une énergie folle). Je finis 3 éme de cette première étape, avec des crampes dues à l’effort enduré et à la chaleur. Je repars en arrière sur le parcours pour prendre des photos pour l’organisation et pour encourager les autres coureurs. Le soir, on part bivouaquer en plein désert sur un site imprévu car l’organisateur veut nous emmener à proximité de ruines indiennes mais c’était sans compter sur le fonctionnement et la circulation dans la réserve indienne. Sur la réserve des Navajos, il faut prendre un « guide » Navajos à qui on remet une certaine somme d’argent et qui va négocier avec les autres Navajos pour le passage sur les pistes et autres mais même en négociant longuement, les indiens refusent alors qu’ils étaient d’accord auparavant ou alors si on passe sur une piste où on a négocié avec tel indien, on a la surprise de voir arriver un autre indien qui dit qu’il est aussi le propriétaire donc il faut renégocier avec cette personne, c’est vraiment à se mettre la tête dans le sable. Du coup on a bivouaqué en plein désert mais on n’a pas pu voir les ruines indiennes.

2 ème étape de 30 km :

Départ à 8h du matin sur une piste ensablée sur environ 10 mn pour rejoindre la grande piste jusqu'à la fin de l’étape. On attaque la grande piste à une allure très rapide, je suis avec les 2 premiers et je m’amuse à mettre des à-coups dans toutes les côtes car je sais qu’ils sont trop rapides pour moi alors je joue les troubles fêtes pour les déstabiliser.
Parfois, des chevaux en liberté s’amusent à courir au galop devant nous sur plusieurs kilomètres puis disparaissent comme des fantômes. On a toujours cette prestigieuse vitrine faite d’un paysage d’une exceptionnelle et rude beauté d’où la vie des indiens Navajos est presque absente. Il faut la chercher ailleurs, dans les profondeurs d’un territoire généralement ignoré. L’étape est dure car la chaleur de plomb nous écrase, on est content quand elle finit surtout moi, j’ai fait l’erreur de boire peu le jour d’avant et aujourd’hui je fini déshydraté malgré les trois litres ingurgités pendant la course. A cause de la chaleur on attend les 10 premiers que l’on amène dans un camp indien où il y a un lieu pour les repas ( une case dont les parois sont fait de planches pour couper du vent et dont le toit est fait de broussailles pour couper les rayons du soleil) et un lieu traditionnel Navajos dit Hogan* (lieu pour les réunions de famille et autres) fait de rondins de bois empilés et recouverts de terre avec une ouverture sur le toit pour l’évacuation de la fumée du foyer. On monte les tentes en attendant les autres coureurs puis repos bien mérité.

3 ème étape de 42 km :

Ce matin on prend les bus puis des 4x4 pour un départ depuis le lac Powell d’un endroit où personne ne peut aller à part les indiens Navajos. Le lieu est complètement irréel mais surtout fabuleux, perdu au milieu de cette immense étendue désertique. Départ pas très rapide sur de la roche puis on rentre dans le décor type des westerns américains fait de roches, de sable, il y a même un petit troupeau de bovin qui effrayé de nous voir courir court devant nous pour s’arrêter plus loin et nous regarder passer, j’ai toujours mon imagination en activité, je m’attends à voir un cow-boy venir chercher le bétail éparpillé. On sort de ce décor fabuleux pour retrouver la grande piste qui monte sur environ sur 7 Km, on recommence à croiser les 4x4 conduits par les indiens Navajos. Passé le 20ème kilomètre, la piste descend jusqu’au 30 ème Km pour remonter sur environ 800 m sur la route. On court maintenant sur une belle route à l’américaine, des kilomètres de lignes droites, on voit l’arrivée de loin mais avec la chaleur et le soleil, on a l’impression que l’arrivée recule plus on avance et surtout que l’on ne va jamais l’atteindre. On attend les 10 premiers puis on rentre au camp pour bien se reposer avec la surprise de s’arrêter dans une boutique à Fouldings qui vend de tout mais surtout où il y a des douches, un vrai luxe pour enlever tout le sable collé sur nous. Le soir j’emménage dans le Hogan car non seulement le vent souffle trop fort mais mon collègue de tente se relève un peu trop la nuit et me réveille à chaque fois.

4ème étape de 30 Km :

Départ dans la fraîcheur (il fait froid aujourd’hui, le temps est couvert) d’une grande piste roulante au milieu de l’immensité du désert pour prendre après des bouts de piste divers : sablonneux ou dans la roche. On longe un grand cayon fait de grands blocs de roche aux formes arrondies, érodés par le vent, avec des petits conifères épars.
Le rythme est très rapide, il y a très peu de vallonnement et on se prend en ligne de mire tellement le terrain est découvert. On fini par un décor grandiose au dessus du grand canyon que l’on a longé sur le parcours sur des roches en escaliers formant dans le milieu comme des bassins creusés par le temps, les couleurs sont fabuleuses, on se sent vraiment petit à coté de ces roches immenses. On attend toujours les 10 premiers et retour au camp. Repos bien mérité.

5ème étape de 30 Km :

¾ d’heure de trajet en bus de route puis de piste pour nous amener au pied d’une falaise, vers une ferme.
Départ sur la piste jusqu'à la ferme puis sentier ensablé et dune de sable (les pauvres coureurs qui étaient avec moi m’ont entendu pestiférer sur ce sable qui rentre dans mes runnings et où je m’enfonce à chaque pas). Les spécialistes du désert sont plus à l’aise que moi dans tout ce sable, on dépasse les 4x4 qui devaient nous mettre de l’eau au 10ème km et au 20ème km. Ils sont complètement ensablés. On double le ravitaillement en attaquant une grande montée et changement de décor, la piste est mi sable/mi roche puis on attaque une grande montée dans la roche et on arrive sur un sommet qui domine toute la plaine avec en cerise sur le gâteau : la grande arche juste en face. Le panorama est absolument époustouflant, j’ai le souffle coupé de voir ces monolithes de grès isolés, ces pinacles aux formes étranges modelées et remodelées par le vent et les pluies d’orages toujours désirées. Mais on redescend de notre nuage car l’organisateur arrête la course, il estime qu’il y a trop de risques dûs un premier temps à la chaleur (il fait une chaleur étouffante) car il n’y a pas de ravitaillement en eau et dans un deuxième temps, lpar a dureté de la seconde partie du parcours (on devait prendre un Wash qui est complètement ensablé). Je repars dans l’autre sens à la rencontre des autres coureurs pour les prévenir. On rentre en marchant pour certains et en courant pour d’autres mais je préfère rentrer en marchant pour profiter des paysages grandioses, ces petits canyons, ces roches érodées qui s’offrent à moi, je ramasse au passage des cailloux ronds noirs. On repasse dans ces dunes que j’ai tant appréciées, j’observe que, sous les petites broussailles il y a des trous fait dans le sable par des petits rongeurs, par endroit on s’enfonce même par l’effondrement des galeries faites sous le sable. On attend tout le monde et on rentre épuisé de cette journée. Au passage vers la ferme, on a croisé le fermier Navajos à dos de cheval parti rassembler un troupeau de mouton pour le rentrer la nuit.

6ème et dernière étape de 30 Km :

Départ sur une large piste avec le stress de la dernière sur environ 10 mn puis on attaque par une petite piste ensablée comme je les aime (on s’enfonce au moindre pas). On longe un barre rocheuse de couleur ocre avec des passages dans des endroits où la roche est comme une coulée de lave pour rentrer dans un dédale de piste et de Washes etparvenir à un énorme trou béant fait dans la barre rocheuse du nom de Window Rock et on prend un passage dans entre les roches, suivi par de nouveau une large piste qui nous amène à un sommet de colline fait de roches érodées et une grande descente sur cette large piste pour le final de cette aventure. Je repars sur le parcours pour me hisser au dessus d’un rocher pour admirer le panorama et voir les autres coureurs arriver. Le vent s’est levé et c’est une tempête de sable qui arrive sur nous. C’est très impressionnant, les mastodontes de roches disparaissent derrière la barrière de sable qui c’est levée, le vent nous cingle par ces rafales de sable. On attend les derniers et on va prendre une douche à la boutique à Fouldings pour se faire beau, car ce soir c’est la remise des prix et demain retour à Las Végas.


UN PEU D’HISTOIRE :

Les indiens Navajos, porteurs d’une culture riche, farouches résistants à l’envahisseur blanc, furent traqués et massacrés dès le XVI ème siècle par les espagnols puis par le pouvoir unificateur de Washington avec le légendaire Kit Carson. Devenus américains, ils relèvent du bureau des affaires indiennes : l’alternative, soumission ou destruction, laisse place à l’autodétermination. Les indiens ont dans leur réserve du charbon, du pétrole et de l’uranium qui est l’une des sources de revenus avec le tourisme car les « chevauchées fantastiques » sont aujourd’hui celles des 4X4 bondés de touristes, étonnés et ébahis par les splendeurs naturelles de Navajoland. La réserve, il s’agit au départ d’un territoire historique qui a été laissé aux tribus après un traité signé avec les autorités américaines. Mais, peu à peu, ce territoire libre a été grignoté, spolié par des lois ultérieures, jusqu’à devenir progressivement de petites réserves morcelées. La réserve est une propriété collective de la tribu, gérée par elle-même, avec son conseil, sa police tribale et ses tribunaux civils.
Les indiens Navajos représentent 200 000 individus sur 2 millions d’indiens aux U.S.A.
L’alcool est prohibé dans la réserve Navajo, mais le long des pistes même au fin fond du désert, on trouve des canettes de bières et autres bouteilles vides car quiconque se fait arrêter, même avec une canette vide à ses cotés, il lui en coûte 2 jours de prison.

Voir également le retour d'expérience de quelques équipements NIKE utilisés lors de cette course.